Le tombeau de Hûd
Jean-François Breton
Christian Darles
A une centaine de kilomètres à l’est de de Tarim, les eaux pérennes du wâdî Hadhramawt, baignent une petite agglomération connue dans tout le sud de la Péninsule Arabique, où se déroule chaque année, un mois avant le Ramadan, un grand pèlerinage qui rassemble une foule impressionnante. Le saint vénéré à Qabr Hûd est nommé dans le Coran et son culte est toujours d’actualité. A l’extérieur des cités antiques, des temples étaient bâtis pour recevoir les visiteurs et les marchands étrangers que l’on ne voulait pas voir entrer dans la ville. Ils jalonnaient le territoire en en fixant des limites tribales ou symboliques. Les archéologues ont retrouvé des dizaines de ces sanctuaires bâtis contre le pied des falaises, tout au long de la vallée, avec leurs grands escaliers, leurs terrasses, leurs salles de banquet et leurs lieux de culte. Mais le plus beau d’entre eux c’est celui qui encore aujourd’hui attire les fidèles du Hadhramawt et du grand désert. Merlons enduits de gypse, encadrements de fenêtres aux triangles polis, huisseries ajourées des moucharabiehs, crépis ravinés par le ruissellement, les demeures se dressent là, immuables, autour de la place du marché, de ses bâtiments à portique et de sa fontaine centrale. Au-dessus de ce théâtre urbain bien ordonné, se dresse le plus grand ensemble cultuel de la région.
Dans un lieu déjà sacré ? La question mérite d’être posée car le sanctuaire de Hûd reprend l’organisation des temples préislamiques. Leurs éléments architecturaux : un escalier monumental, un, voire , plusieurs accès en baïonnette et un bâtiment cultuel au centre d’une terrasse haute sont en effet communs à la plupart des sanctuaires antiques. Peut-on ainsi supposer une filiation entre ces lieux de culte ? C’est probable, et le cas de Hûd n’est pas unique en Hadhramaw t. Le mausolée de Ahmad ibn ‘Isà, à l’est de Say’ûn, avec sa mosquée basse, son escalier à flanc de pente et sa tombe supérieure, en serait un au tre exemple. De toute façon, les modèles antiques ne sont pas loin. Sur la rive gauche, à moins de cinq kilomètres de Hûd, se trouve le temple de Bâqutfa, fouillé en 1979, avec son escalier monumental, ses accès coudés et sa cella basse à toit plat.
Revue Saba, 3 & 4, Hadramawt, la vallée inspirée,1996, pp. 79-82.
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